Il faut remarquer qu’ayant adopté l’opinion de son maître, contre celle de Platon, c’est-à-dire l’idée d’installer une ville au bord de la mer, Alexandre n’avait pas l’embarras du choix, le littoral égyptien n’offrant, en effet, guère de possibilités. Le site de Péluse, à l’est, était une région boueuse et surtout trop exposée aux attaques des envahisseurs venant de l’est, au premier rang desquels se comptaient les Perses. Plus à l’ouest, en bordure des lacs, il ne pouvait être question d’aménager un port, la bande de terre étant trop étroite et sans aucun abri. La rade où se développera Canope n’était protégée que des vents d’ouest, qui ne sont pas dominants, et la baie d’Aboukir était trop largement ouverte pour servir de refuge aux navires. Seul le site de Pharos, petite île parallèle au rivage, était susceptible d’offrir un abri, notamment à l’est, où le cap Lochias formait une protection contre les vents du nord-est, les plus redoutables. Pour trouver un port d’intérêt très relatif, il fallait gagner Paraitonion, l’actuelle Mersa-Matrouh, située à 291 kilomètres d’Alexandrie par la route. C’est de là que partit Alexandre pour aller à l’oasis de Siouah, à 302 kilomètres au sud-ouest. La lagune située à l’ouest du port actuel sera utilisée comme port militaire pour la flotte égyptienne ; de plus la plage de sable blanc était propice aux navires à faible tirant d’eau de l’Antiquité. Mais l’éloignement du site rendait impossible l’établissement d’une ville importante, et la proximité de la Cyrénaïque pouvait se révéler dangereuse en cas de conflit. |
En faveur de Pharos plaidait l’exiguïté de l’île ; s’étendant sur 3 000 mètres, elle paraissait échapper au défaut redouté par Aristote : l’excès de population se livrant au négoce. En outre, l’île présentait deux ports : celui à l’ouest appelé Eunostos1 (Bon Retour), qui était en dépit de son nom le moins préservé, et le port2 est (Grand Port), protégé du côté est par le cap Lochias. Les deux ports communiquaient par des passages voûtés percés dans la digue qui joignait l’île à la terre. Les deux ports furent reliés par un canal à voie d’eau artificielle appelé Agathos Daimôn, puis plus tard canal Mahmoudieh. Ce grand canal contournait Alexandrie par le sud et, grâce aux deux autres canaux qui y étaient aboutés, mettait en communication le fleuve et la mer. L’un des canaux passait à l’ouest de la colline de Rhakotis, l’autre à l’est de la colline de Bruchion. Ce réseau de voies navigables donnait à la ville un petit air de l’actuelle Venise. L’aménagement de ces canaux4, liés au port fluvial, permit de satisfaire deux des exigences formulées par Aristote : l’exportation et l’importation des marchandises ou des matériaux, et la communication avec l’arrière-pays. |
![]() |